La seule façon de progresser en tant que joueur d'échecs (et en tant que personne)
Chaque fois que je découvre les commentaires de nos lecteurs, je ne peux m'empêcher de penser : nous avons la meilleure communauté d'échecs au monde ! C'est un contraste frappant avec la majorité des forums Internet, où une conversation typique ressemble à ceci :
Post de base : "Les pommes sont-elles bonnes dans l'épicerie XYZ ?"
Personne A : "Les pommes ? Vous vous moquez de moi ? Achetez des poires, elles sont meilleures pour la santé !"
Personne B : "Ne faites pas vos courses à l'épicerie XYZ, c'est mieux à Walmart !"
Il y aurait alors un fil de discussion de plus de 100 messages où les gens se demanderaient si les poires sont meilleures que les pommes et si Walmart est moins cher que l'épicerie XYZ. Le post originel nécessitait pourtant simplement une réponse courte comme : "Les pommes de l'épicerie XYZ sont bonnes et assez bon marché à 0,99 euros le kilo."
Heureusement, notre communauté Chess.com est plutôt mature et serviable. Je peux attester que j'ai beaucoup appris ici et je vous recommande vivement d'utiliser l'intelligence collective de nos millions de membres.
Voyez-vous, il existe deux catégories de personnes : celles qui ont leurs opinions gravées dans le marbre et celles toujours prêtes à évoluer et à progresser. Un bon exemple de ce phénomène est celui de deux éminentes personnalités du monde des échecs originaires de Saint-Pétersbourg (anciennement connu sous le nom de Leningrad).
Un célèbre entraîneur d'échecs, Vladimir Zak, était connu pour ses opinions tranchées et son attitude générale "à prendre ou à laisser". Dans son livre génial The Road To Chess Improvement (Le chemin vers l'amélioration aux échecs), le GM Alex Yermolinsky décrit assez bien Zak :
"Zak croyait religieusement au dogme de l'école classique. [...] Toute idée nouvelle (c'est-à-dire tout ce qui était postérieur à 1947) était ignorée ou combattue avec véhémence lorsqu'elle était évoquée par les élèves eux-mêmes ; même les ouvertures autres que 1.e4 e5 ou 1.d4 d5 étaient désapprouvées."
Yermolinsky m'a raconté un épisode qui est resté gravé dans sa mémoire. Il avait gagné sa première partie contre un Maître et était sur le point de la montrer aux autres membres de son club d'échecs. Notez qu'à cette époque, battre un Maître était un événement extraordinaire - imaginez que vous ayez battu Hikaru Nakamura, même si ce n'est qu'une simulation.
Les enfants ont donc fait le tour de l'échiquier et le fier Yermolinsky a joué son premier coup dans cette partie, qui s'est avéré être 1.g3. Une fois que Zak a vu ce coup "indécent", il est parti instantanément en disant : "à partir de ce point, la partie n'est pas intéressante pour moi". Yermolinsky était un enfant dur au mal qui a grandi dans un quartier où les bagarres de rue étaient son pain quotidien. Pourtant, après une telle déception de la part de son entraîneur, il avait les larmes aux yeux. La conclusion de Yermolinsky ne devrait donc pas être une surprise :
"Nous avions une blague : quiconque survit à sa "méthode d'entraînement" est assuré d'un avenir brillant ! L'important était de quitter Zak avant que la frustration ne s'installe et que vous décidiez d'abandonner les échecs. Les GM Valery Salov et Gata Kamsky l'ont assez vite mis de côté et sont devenus des stars à l'adolescence."
Un autre élève de Zak, le GM Viktor Korchnoi, avait l'attitude exactement inverse : il remettait tout en question et évoluait donc constamment.
Je me souviens d'une conversation que j'ai eue avec Korchnoi dans les années 1990. Il m'a dit qu'après avoir remporté son deuxième championnat soviétique en 1962, il a analysé ses parties et s'est rendu compte qu'il "ne savait pas vraiment comment jouer aux échecs." J'ai été choqué d'entendre cela ! Afin d'apprendre de nouvelles idées, il invitait constamment de jeunes joueurs à ses séances d'entraînement. Par conséquent, il a évolué toute sa vie en adoptant avec enthousiasme les nouvelles tendances échiquéennes.
Regardez la partie suivante d'un Korchnoi de 78 ans contre un adversaire très fort qui était presque quatre fois plus jeune :
En écoutant les conseils du lecteur, j'ai appris que le bitcoin a été inventé par un groupe de personnes inconnues en janvier 2009 et tout est devenu plus clair pour moi. Le bitcoin a été créé presque immédiatement après le début de "l'Assouplissement Quantitatif" pendant la grande crise financière. Le bitcoin est donc comme un "aimant à argent". L'argent y afflue (au lieu de faire grimper les prix à la consommation et l'inflation) et n'en sortira jamais (d'autant plus qu'environ 140 milliards de dollars de bitcoins sont déjà bloqués dans les portefeuilles en raison de la perte des mots de passe).
Ainsi, ce que je pensais être une escroquerie s'est avéré être une invention financière de génie qui nous permettra d'imprimer notre chemin vers la prospérité sans le danger de l'hyperinflation ! Oui, cela n'est pas directement lié aux échecs, mais cela montre combien vous pouvez apprendre de nos membres.
b) Vous gardez votre opinion mais voyez que d'autres idées sur le sujet sont aussi valables que la vôtre.
Dans un de mes articles, j'ai montré la célèbre partie suivante :
J'ai écrit que le sacrifice du pion 15.g4 ! était un coup évident - pour moi, c'est l'ABC des échecs. Pourtant, l'un des lecteurs a contesté cette évidence, arguant qu'il existait d'autres options. Encore une fois, je suis d'accord avec ce lecteur. Vous pouvez lire mon article sur ce sujet ici. C'est typiquement un cas où, bien que mon opinion soit toujours valable, elle n'est pas le seul point de vue correct.
c) L'opinion des autres ne fait que renforcer la vôtre.
Dans mon article précédent, j'ai qualifié la récente "partie" entre Magnus Carlsen et Nakamura avec 1.e4 e5 2.Re2 Re7 de néfaste pour les échecs. J'ai eu l'occasion d'entendre certaines opinions sur le fait qu'il s'agissait d'une "ouverture mème" et d'une blague démontrant un sens aigu de l'humour échiquéen, etc. Avec tout le respect que je vous dois, je m'en tiendrai à mon opinion initiale.
Vous voyez, il y a certains films que vous pouvez regarder sur certaines chaînes de télévision payantes destinées à un certain public adulte et c'est très bien. Il suffit de ne pas diffuser ces films sur les grandes chaînes de télévision aux heures de grande écoute. Si Carlsen et Nakamura avaient joué cette "partie" au cours d'une session de blitz amicale, cela me conviendrait parfaitement, mais ils l'ont fait sur une scène plus grande avec de nombreux téléspectateurs.
2) Remettez en question vos opinions !
Demandez-vous : "Et si le contraire était vrai ?" Dans certains cas, vous pourriez être surpris !
Prenez par exemple le vieil axiome : "Ne sortez pas votre dame trop tôt". Après quelques recherches, vous pourriez découvrir que des ouvertures impopulaires comme 1.e4 e5 2.d4 exd4 3.Dxd4 ne sont pas si mauvaises. Vous pouvez l'essayer dans quelques parties amicales ici sur Chess.com et qui sait, peut-être que vous serez à l'origine de fulgurances comme celles-ci :
En conclusion, je ne peux que répéter les sages paroles d'Héraclite qu'il a prononcées il y a 2500 ans : "La seule constante dans la vie est le changement !"