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Ding Liren nouveau champion du monde d'échecs après des départages XXL
Ding Liren, radieux, après son incroyable victoire. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Ding Liren nouveau champion du monde d'échecs après des départages XXL

JackRodgers
| 2 | Couverture d’événements d’échecs

Ding Liren trône officiellement sur le toit de la planète échecs après sa victoire épique dans l'ultime partie rapide de départage face à Ian Nepomniachtchi. Suivant le duel palpitant en classique soldé par une égalité 7-7, les prolongations nous ont offert un spectacle exceptionnel, le niveau de jeu de nos deux gladiateurs atteignant des sommets. Au bout du suspense, c'est le numéro 1 chinois qui est devenu le 17eme champion du monde de l'histoire, succédant ainsi à Magnus Carlsen, dominateur depuis 2013.

Outre la couronne suprême, Ding a été récompensé d'1,1 millions € pour son titre quand Nepomniachtchi s'est vu attribuer 900 000 € pour sa place de dauphin.

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La retransmission en direct avec Kévin Bordi et le GM Fabien Libiszewski.

Ding n'a pas contenu ses larmes de joie suite à l'abandon de son rival, laissant enfin retomber toute la pression accumulée en un mois d'un combat épuisant. 

Le sens de la vie se trouve dans ces moments spéciaux et exceptionnels.

— Ding Liren en 2019


Un moment indescriptible pour le GM chinois. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

"J'ai le sentiment que ce match reflète le plus profond de mon âme", a délcaré Ding lors de la conférence de presse, après avoir dédié sa victoire à ses amis, sa mère et son grand-père. Avec cet accomplissement, Ding devient le tout premier champion du monde classique chinois tandis que sa compatriote et GM Ju Wenjun règne quant à elle sur les échecs féminins.

Ding, félicité par l'ancienne championne du monde Xie Jun. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Après trois nulles de haute volée où le niveau de jeu frisait la perfection malgré l'accélération de la cadence, nos deux duellistes demeuraient au coude à coude avant l'ultime joute de rapide où Nepomniachtchi bénéficiait de l'avantage des blancs. Voir Ding presser avec les pièces noires s'est révélé une petite surprise, les statistiques (cinq victoires pour les blancs et une pour les noirs dans les 17 premières parties) favorisaient clairement le joueur débutant la partie en premier.

Cette 18eme partie s'est déroulée sur le terrain familier de l'Anti-Marshall, Nepomniachtchi estimant avoir "eu toutes ses chances" jusqu'alors dans cette ouverture. Cependant, son idée originale 13.Fb1 a semblé se retourner contre lui quand le fou s'est retrouvé emmuré derrière ses propres pions après une séquence très précise de Ding.

Les deux joueurs ont fait preuve d'une combativité hors norme dans cette dernière partie. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Ses pièces toutes harmonieusement placées, le numéro 1 chinois a décidé d'ouvrir le jeu pour asseoir son initiative mais Nepomniachtchi a aussitôt retrouvé de sa superbe, mettant en lumière des ressources brillantes pour réveiller son fou endormi. À mesure que la tension montait, les audiences de Chess.com, toutes plateformes confondues, ont culminé à 441 000 spectateurs, doublant presque l'audience moyenne de retransmission (de l'ordre de 220 000 spectateurs). 

Prenant conscience que le danger s'inversait, Ding a religieusement forcé quelques échanges après quoi il était difficile d'imaginer que Nepomniachtchi pouvait perdre selon ses propres termes.

Les fans étaient nombreux à attendre le dénouement ! Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Ding pouvait cependant toujours compter sur son pion passé éloigné dans la colonne a pour compenser l'attaque des blancs contre son monarque. Il devint de plus en plus difficile de déterminer qui jouait pour le gain, les deux hommes prenant à tour de rôle tous les risques pour complexifier la position malgré leurs précieuses secondes qui s'égrainaient. 

Avec seulement 2 minutes et 30 secondes à la pendule, Ding a enchainé une séquence de coups brillante, conclue par l'indispensable 42...De2!! pour se sortir d'un clouage embarrassant après avoir croqué un pion !

Dans la foulée, Nepomniachtchi a pensé forcer un échec perpétuel sur cases blanches pour se diriger vers les blitz de départage quand - coup de tonnerre - Ding a placé sa tour devant son roi signifiant son intention de jouer le gain à tout prix ! Sonné, le Russe s'est montré imprécis l'espace d'un coup, créant une brèche dans laquelle son rival s'est engouffré avec brio. Survolté, Ding a enchainé les coups de butoir, poussant ses deux pions passés jusqu'à une case de la promotion quand Nepomniachtchi essayait de trouver du contre-jeu sur le roi. Toutes ses ressources épuisées, le vainqueur des derniers Candidats, n'a eu d'autre choix que de tendre la main à son valeureux adversaire pour lui signifier son sacre.

Le GM Rafael Leitao a analysé cette bataille épique en détails :

Cette dramatique poignée de main au 68eme coup a donc marqué la fin d'un match extraordinaire qui a failli se prolonger en blitz de départage pour la première fois dans l'histoire des échecs.

Beau joueur, Nepo a serré une deuxième fois la main de son bourreau. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Les messages de félicitations ont aussitôt afflué de la part des grands noms des échecs, toutes générations confondues avec en point d'orgue l'adoubement de Carlsen :

L'auto-clouage pour l'immortalité. Félicitations Ding !! [en référence au choix très courageux de Ding de refuser la répétition de coups en clouant sa propre tour avec 46...Tg6]

Il est impossible de féliciter suffisamment les deux joueurs. Aujourd'hui encore, ils ont fait preuve d'une énergie incroyable et la quatrième partie a été épuisante. Toutefois, Ding a survécu à tant de difficultés et a gardé le meilleur pour la fin ! - Vishy Anand

Avant ce feu d'artifices final, trois joutes de très grande qualité avaient contribué à faire monter la pression, aucun des deux joueurs ne cédant le moindre pouce de terrain.

Les deux hommes pour leur ultime duel sur scène. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Dès la première partie, Nepomniachtchi a joué dans son style habituel à un rythme rapide et sans craindre les complications.

Le moment le plus excitant de la partie est survenu après la superbe pointe 25...axb6!! de Nepomniachtchi, laissant sa dame en prise, mais imprenable en raison d'un mat imparable à suivre. Pour éviter cette fin en eau de boudin, Ding a forcé une liquidation et par conséquent, une nulle par répétition après 35 coups.

Caruana a estimé à propos du résultat : "Ian peut être très heureux après une ouverture dangereuse" tandis que Hess s'est montré davantage admiratif des ressources trouvées par le Russe, citant Ernest Hemingway : "Le courage est la grâce sous la pression."

La première partie rapide a donné le ton ! Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Sans surprise, l'Anti-Marshall fut le choix de Nepomniachtchi pour essayer de prendre l'avantage avec les blancs. Sa préparation s'est révélée affûtée puisqu'il est parvenu à mettre son rival sous pression mais ce dernier a fait preuve d'une précision chirurgicale en défense. Les deux joueurs ont fini par sceller la nulle dans une finale de tours égale.

Nepomniachtchi a néanmoins émis des regrets à propos de ce partage du point : "Le tournant est survenu dans la deuxième partie, j'ai eu plusieurs occasions de gagner mais je ne les ai pas saisies".

La troisième partie rapide fut "la plus paisible" avec un taux de précision de plus de 99 (!) chez les deux joueurs, annonçant le calme avant la tempête. Ding a joué 1.Cf3 pour la première fois dans ce match avec un double-fianchettos que son rival est parvenu à neutraliser sans trop souffrir dans une finale de fous de couleurs opposées avec un pion de moins.


Nepo a tout donné mais est tombé sur un Ding en état de grâce dimanche. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Après la partie décisive et la libération des chaînes qui l'empêchait de partager des infos sur sa préparation et ses secondants, Nepomniachtchi a révélé que son équipe comprenait nul autre que l'ancien champion du monde Vladimir Kramnik ainsi qu'une "grosse équipe de soutien" avec les GM Maxim Matlakov, Ildar Khairullin et Nikita Vitiugov

L'identité du secondant de Ding ne faisait lui plus de doute depuis longtemps, son partenaire de crime, le GM Richard Rapport, posant avec ses amis, sa famille et ses fans après cette victoire historique.

Rapport avec sa femme Cindy Li et Xie Jun. Photo : Maria Emelianova/Chess.com.

Interrogé sur la manière dont il fêterait sa victoire, Ding a répondu qu'il aimerait "voyager" pendant son temps libre. Le nouveau champion du monde n'aura cependant pas beaucoup de repos après son sacre. Dans quatre jours, il participera au Grand Chess Tour à Bucarest, en Roumanie, aux côtés d'ailleurs de Nepomniachtchi, Rapport et d'autres Grands Maîtres.

Avec la fin de ce cycle de Championnat du Monde, plusieurs questions viennent à l'esprit. Combien de temps Ding conservera-t-il le titre ? Carlsen tentera-til de reconquérir sa couronne ? Quelles que soient les réponses, une chose est sûre : les échecs n'ont jamais été aussi excitants qu'aujourd'hui et le Championnat du Monde FIDE 2023 en a été la parfaite illustration.

Comme l'a dit Anatoly Karpov : "Les échecs sont tout : un art, une science et un sport".

The 2023 FIDE World Champion. Photo: Maria Emelianova/Chess.com.

Découvrez le résumé en vidéo de ces départages avec Kévin Bordi et Fab Libi :

Score du Match Score (départages)

Fed om Elo rapide 1 2 3 4 Score
Ding Liren 2829 ½ ½ ½ 1 2.5
Ian Nepomniachtchi 2761 ½ ½ ½ 0 1.5

Score du Match (classique)

Fed Nom Elo 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 Score
Ding Liren 2788 ½ 0 ½ 1 0 1 0 ½ ½ ½ ½ 1 ½ ½ 7
Ian Nepomniachtchi 2795 ½ 1 ½ 0 1 0 1 ½ ½ ½ ½ 0 ½ ½ 7

Le Championnat du Monde FIDE 2023 est l'événement classique le plus important de l'année puisqu'il décide du nouveau champion du monde. Nepomniachtchi et Ding disputent un match pour savoir qui succédera à Carlsen sur le trône. Ce duel au sommet est doté de 2 millions d'euros de prix et se déroule sur 14 parties classiques ; le premier joueur à marquer 7,5 points l'emporte.


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